Le Maître Omraam Mikhaël Aïvanhov ne
s'est jamais réellement confié sur sa vie, même à ses plus proches disciples. Olivier Manitara a comblé ce manque d'informations par une
investigation personnelle dont il a acquis la maîtrise au fil du temps.
Extraits
Olivier, tu as parlé plusieurs fois des sept marches de
l’initiation et que le Maître Aïvanhov, tout comme le Maître Deunov, se tenait
sur la quatrième marche. Pourquoi ces deux Maîtres n’ont-ils pas essayé
d’atteindre la cinquième marche ?
Il faut comprendre que ces questions appartiennent aux mystères de
l’initiation. Il n’est donc pas possible de tout dire sur ces sujets qui
doivent avant tout être vécus. Le chemin ne peut être connu qu’en l’arpentant.
Néanmoins, il est toujours bon de méditer sur ces initiations sacrées car
ainsi, on prépare le corps à entrer dans les mystères.
Parler de sept marches en matière d’éveil de la conscience n’est
pas nouveau et l’on peut trouver des références à des degrés d’initiation dans
toutes les traditions des peuples. Ces degrés servent essentiellement à
décrire des états d’être ne pouvant être vécus par tous les hommes : seuls ceux qui
s’engagent sur un chemin conscient de travail sur soi peuvent espérer
progresser et franchir les différentes étapes unissant l’homme à Dieu.
Ils deviennent alors ceux qui ouvrent le chemin et permettent à
chaque individu composant le corps de l’humanité de progresser, de s’éveiller
et de vivre un état de conscience supérieure, dans la simplicité et l’amour.
Il ne s’agit pas de tomber dans le piège de
donner des grades et d’enfermer les êtres dans des boîtes, de leur coller des
étiquettes. C’est uniquement en plongeant au plus profond de soi, dans une
attitude de claire réceptivité que l’on peut discerner soi-même exactement où
l’on en est. Si cette lumière n’est pas allumée en soi, alors les degrés
extérieurs ne servent pas à grand chose et peuvent même être dangereux.
Dans le monde extérieur, un homme peut assez facilement leurrer
les autres quant à son degré d’évolution, ses réelles intentions, sa soi-disant
supériorité et sa capacité à guider… Mais il faut comprendre que dans la
vie intérieure toute tentative de paraître autre que ce que l’on est échoue, et
conduit inévitablement vers une souffrance, une maladie, un malheur.
Il n’y a rien de pire que de ne pas être
soi-même. Les «
degrés » de l’initiation ne sont donc pas des grades qui rendraient celui
qui les possède « plus évolué » qu’un autre. Absolument pas. C’est pourquoi «
ces marches » appartiennent aux Ecoles des mystères authentiques. Elles ne sont
pas figées, ni déterminées par des frontières précises suivant l’idée que l’on
se fait de la hiérarchie dans le monde des hommes.
Le Maître Jésus a dit : « Le plus grand parmi vous sera le plus grand serviteur » et c’était là une vision du monde
divin. En effet, le Divin considère l’homme comme un instrument. Servir Dieu,
c’est servir le bien en tous les êtres. Numéroter les marches de l’évolution en
comptant les barreaux de l’échelle de Jacob, c’est se placer à l’extérieur,
c’est développer une vision humaine.
Un disciple peut dire : « Mon Maître était le plus grand, il se
tenait obligatoirement sur la septième marche »… et en cela il peut avoir
raison, par rapport à son propre niveau d’évolution. Le but n’est pas
d’éveiller une polémique, mais d’utiliser le point de vue de l’Ecole des
mystères, qui est essentiellement impersonnel et objectif.
Seul ce qui est divin en nous-mêmes peut
devenir conscient du divin. Ce qui
est humain est invité à participer, mais ne doit en aucun cas servir de critère
pour mesurer ce qui est immortel et éternel. Je donne cette précision en guise d’avertissement car
dire qu’un Maître est sur telle ou telle marche peut être un piège sur le
chemin de l’éveil.
Quelque chose en l’homme peut s’emparer d’une telle information
pour la transformer en savoir mort. Il y a une pensée qui est morte et qui
nourrit la décomposition et une autre qui est vivante et qui s’unit avec le
Père, qui est une avec sa Lumière. Il ne s’agit pas seulement de penser
les choses, mais de les vivre, de conduire la pensée dans l’expérience vivante.
Ainsi, il ne peut y avoir de polémique parce que la lumière extérieure nourrit
la Lumière intérieure et la conduit vers le haut.
La pensée vivante renvoie l’homme à lui-même et au mystère de sa
vie intérieure. Il ne
voit plus dans un Maître un nouveau potentiel susceptible de faire tout le
travail à sa place, mais un être l’invitant à éveiller et à actualiser son
propre potentiel et sa Lumière intérieure. Ainsi, le ‘degré’ devient secondaire
à partir du moment où chacun se tient à sa place dans une œuvre d’ensemble.
Cette œuvre est nécessairement une Ecole de Dieu. C’est la plus belle
qu’un individu puisse concevoir car elle le relie au Père dans la vérité et
donc à l’ensemble des êtres vivant en Lui et par Lui. Il n’est plus coupé des autres, il n’est
plus passif face à la vie, mais devient un membre actif et positif de la
hiérarchie de la lumière.
On peut donc dire qu’il se tient sur la première marche : il a
éveillé le Dieu vivant en lui par une expérience consciente individuelle le
rendant libre et pourtant solidaire. Pour les autres, il n’y a pas de réelle
compréhension possible des degrés de l’initiation ou des marches qui montent
vers le Sublime car ils verront toujours le côté extérieur, la reconnaissance,
le pouvoir sur les autres, la domination, la supériorité dans le monde de la
mort.
Celui qui a gravi la première marche ne
voit dans ce mystère que quelque chose de naturel et de positif qui ne comporte
aucune frontière définie, à l’image d’un arbre qui pousse. Au fur et à mesure qu’il
grandit, il passe d’une étape à l’autre pour atteindre naturellement
l’accomplissement ultime de son être et de son incarnation sur terre.
La vie d’un arbre ne s’arrête pas lorsque sa forme extérieure se fond de
nouveau dans l’océan de la terre. L’homme, à l’image de son Frère l’arbre, doit grandir
physiquement, mais aussi spirituellement et divinement. C’est un art de vivre
qui passe d’un état à un autre dans une croissance ininterrompue. Jésus appelait ce chemin : « la résurrection
et la vie ». La vie véritable venait après le processus de la
résurrection des morts qui est « l’Initiation » proprement dite.
Dire d’un être qu’il se tient sur la première, la quatrième ou la
septième marche de la vie est une façon de parler signifiant qu’il est au
début, au milieu ou à la fin de sa quête. Il ne faut voir dans cette numérotation
aucune idée de supériorité ou d’infériorité.
Dans le langage de l’Ecole de
Dieu, chaque marche correspond à une initiation précise, mais elle est sujette
à de nombreuses interprétations suivant chaque situation. La quatrième marche correspond au sommet
qu’un homme puisse atteindre. Au-dessus d’elle se trouve l’initiation des Fils
et des Filles du soleil.
La cinquième marche appartient au monde des Dieux et en cela, rien
d’humain ne peut pénétrer dans ce monde qu’elle permet d’atteindre. Très rares
sont les Maîtres qui sont parvenus à poser leurs pieds sur cette marche.
Le Maître Peter Deunov n’a pas tenté d’atteindre cette marche
parce qu’il n’en n’avait pas besoin pour la réalisation de sa mission sur
Terre. Le Maître Aïvanhov, quant à lui, a essayé de gravir ce degré, mais les
conditions extérieures n’étant pas propices, il a raté son initiation.
Cela a été pour lui la pire épreuve qu’un homme puisse
endurer : il a été anéanti psychiquement et asservi dans sa vie extérieure
par des forces qui se sont opposées à lui et à son idéal. Le Maître a mis
plusieurs années pour reconstruire un lien avec le monde divin et à dater de ce
moment, il est resté dans une humilité qui l’a soutenu toute sa vie et lui a
permis de vivre en communauté. Oui, c’est cette vie simple et
chaleureuse en communauté qui l’a soutenu toute une partie de sa vie.
Tu dis que le Maître a échoué dans cette
initiation, pourtant l’œuvre qu’il a accomplie est grande et magnifique.
Je n’ai jamais affirmé le contraire et je le dis ici en toute
clarté : l’œuvre du Maître Aïvanhov est magnifique, et
d’autant plus grande qu’elle s’est accomplie au prix de grands efforts et de
grandes victoires sur soi. Cette
œuvre est un don de soi de la part d’un homme qui a voulu glorifier
l’Enseignement de la Lumière aux yeux de tous et pour le bonheur de tous.
Il faut savoir que lorsque l’on
tombe dans un ravin, on a deux choix : soit on meurt, soit on s’en sort. C’est ce qu’est parvenu à réaliser le
Maître Aïvanhov : il est remonté grâce à sa perception et à son alliance avec
le monde divin. C’est parce qu’il a touché le fond et qu’il est parvenu à se
redresser, dans la Lumière et pour la Lumière, qu’il est devenu l’homme et le
Maître que nous connaissons.
Pourquoi le Père qui est amour ne
protège-t-il pas les hommes de telles épreuves ?
Moïse a dit qu’aller vers Dieu était dangereux : « Dieu est un feu
dévorant. » Il faut aller vers Lui avec une grande pureté, en étant
correctement préparé. Le Père vit dans un autre monde, celui de l’instantanéité. Il
ne peut empêcher les pensées, les ressentis, les actes des hommes. Alors si
l’un d’eux s’approche de Lui, il peut être totalement broyé et détruit par ce
qu’il porte en lui comme impureté.
Il est dit que le Père est amour parce que justement, il donne à
chacun, suivant sa propre mesure et ses propres besoins. Il vit dans tous les mondes et il demande
aux hommes de tisser un lien conscient et agissant avec Lui. Ce lien vivant
permet de rester en relation avec le Plus-Haut.
Si l’homme nourrit en lui un mensonge tout en croyant que c’est la
vérité et qu’il évalue ses actes à l’aide d’une lumière trompeuse, le Père
lui-même ne pourra enlever le voile opaque que l’homme tisse autour de lui. Pour
ce qui est du Maître Aïvanhov, de toute évidence, le Père lui a accordé sa
protection de lumière et son amour.
Tomber dans le ravin a redressé le Maître et lui a apporté la
libération et la gloire par la suite. Il n’a pas laissé le Maître des années
dans cette situation, mais il lui a, par la suite, permis de grandir et de sortir
de cette épreuve en étant pleinement victorieux. Finalement
si le Maître n’avait pas connu cette épreuve, il serait resté toute sa vie un
initié au service de la Lumière, mais il n’aurait pas pu stabiliser en lui les
fondements indestructibles qui lui ont permis de créer une Ecole de Dieu.
Peux-tu nous dire ce que le Maître Aïvanhov
a compris en passant cette initiation mystérieuse ?
Juste après cette initiation, des forces destructrices très
violentes ont agressé le Maître, jusqu’à ce qu’il se retrouve injustement en
prison. Pendant tout ce temps où il était enfermé, le Maître a beaucoup
réfléchi et il a entre autres compris que l’homme avait des yeux pour voir, des
oreilles pour entendre, qu’il avait tous ses sens en éveil, mais que s’il ne se
servait pas de ses sens pour capter le monde divin, il était dans l’illusion,
l’erreur, le péché, le mensonge.
A ce moment précis, il a réellement compris que ce que
la science initiatique appelait « le monde invisible » n’était pas invisible,
mais plutôt un écho, un cône dont on ne perçoit que la pointe. Il a compris que tout
ce que l’on peut percevoir sur le plan physique est la plus petite partie de ce
qui existe et se manifeste dans un autre monde avec une dimension beaucoup plus
grande.
Cette compréhension vivante a été un tournant capital dans
l’élaboration de sa vision sacrée du monde. Elle a développé en lui un sens
particulier qui l’a orienté toute sa vie. C’est une des raisons pour lesquelles
il était parfois si sévère sur les paroles que l’on pouvait dire, les gestes ou
les attitudes que l’on pouvait avoir car il percevait en chaque chose la
grandeur de l’autre monde.
Il a finalement développé une sorte de double vue, mais différente
de celle que peut avoir un ‘clairvoyant’ au sens où on l’entend généralement. Il acquit plutôt l’intelligence que tout ce
qu’il pouvait appréhender dans le monde des sens était en réalité une écriture
magique qui révélait une autre dimension et un autre monde. A
travers tous les évènements, il arrivait à déterminer ce qu’il y avait de
beaucoup plus grand derrière, dans les mondes subtils et intelligibles.
Pour cette raison et au fil des années il est devenu de plus en
plus intransigeant au sujet de la discipline de vie, de la conscience et de la
maîtrise des gestes, des paroles, de la façon de regarder les choses, de
manger, de se tenir à table, d’écouter la musique, de bouger… Il analysait tout cela dans les plus petits détails car
il percevait à travers toutes ces manifestations de la vie la manifestation
tangible et concrète d’un autre monde.
Pour lui, toute la force était
dans la conscience et la maîtrise du plus petit détail. Cela
pouvait paraître étrange pour un novice, mais le Maître avait vraiment
conscience que chaque détail physique n’était que le plus petit maillon d’une
chaîne qui s’étendait dans l’invisible pour entrer dans l’infiniment grand.
Cette perception fut le fruit de son initiation. Elle le porta
toute sa vie et lui permit d’accomplir une œuvre grandiose reliée au Père.
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