En faisant de la croix le symbole de
leur religion, les chrétiens ont mis particulièrement l’accent sur la
crucifixion de Jésus. Bien sûr, il est salutaire de s’associer à la passion et
à la mort de Jésus pour comprendre la grandeur de son sacrifice ; certains
mystiques ont ressenti si intensément l’horreur de son supplice que des
stigmates sont apparus sur leur corps : c’étaient des êtres exceptionnels,
capables d’une telle abnégation et animés d’un tel amour pour Jésus qu’ils ont
pu revivre ses souffrances telles qu’elles sont enregistrées dans les archives
de l’univers. Car il existe une bibliothèque cosmique, l’Akashia Chronica, où
les événements de la vie des grands Maîtres sont inscrits et restent à la
disposition de ceux qui veulent les connaître et qui sont dignes d’arriver
jusque-là.
Tout ce que les grands Maîtres, les
messagers du Ciel, ont vécu de dramatique ou bien d’heureux, de lumineux,
d’inspiré, appartient à toutes les âmes humaines qui ont de l’amour pour eux.
Certains veulent revivre les événements sombres et douloureux de leur
vie ; qu’ils le fassent, c’est une attitude généreuse, ils s’associent à
leur sacrifice pour le salut du genre humain. Mais ceux qui ont déjà traversé
plusieurs fois ces souffrances n’éprouvent plus le besoin de revivre la
crucifixion de Jésus.
La vérité, c’est que le symbole de la
croix répandu à travers toute la chrétienté n’a pas encore été pleinement
compris ; on ne voit à travers lui que Jésus faible, mourant, victime
bafouée par les hommes. Dans toutes les églises, les fidèles contemplent le
crucifix, mais ils ne doivent pas oublier de se lier à l’autre aspect de ce
symbole, qui est plus puissant, plus salutaire : la gloire du Christ
ressuscité, le Christ sortant de la croix, victorieux de la croix.
Jésus est mort pour le vieux monde, pour
tous ceux qui ont des dettes à payer,
des fautes à réparer. Malheureusement, il faut reconnaître que cela
n’impressionne plus tellement de gens. Combien de personnes sans lumière, sans
conscience, ne se sentent pas concernées par le fait que Jésus se soit sacrifié
pour elles, il y a deux mille ans, en mourant sur une croix ! Cette mort
ne représente quelque chose que pour ceux qui, ayant conscience de leurs
imperfections, ont déjà beaucoup souffert et souffrent encore. Mais ceux-là,
c’est sur la résurrection qu’ils doivent se concentrer ; ils doivent
chercher à ressusciter et non plus à souffrir. La souffrance n’est pas un but
en soi. Jésus a souffert, c’est entendu, mais ensuite il est ressuscité. Et que
signifie ressusciter ? En russe, résurrection se dit "voskressénié" ,
et en bulgare "veuzkressénié", ce qui signifie : sortie de la
croix. Comment expliquer cette étymologie ?
La croix, c’est le creuset des
alchimistes, comme le révèle l’étymologie : le mot "creuset"
vient du mot croix. L’alchimie est un travail de transformation de la
matière. Dans le creuset, l’alchimiste place la matière première qui commence
par mourir et se putréfier ; cette opération correspond à la couleur
noire. Ensuite, la matière se dissout et se purifie : elle devient blanche.
Puis, c’est la distillation et la conjonction, et la matière passe au rouge.
Enfin, c’est la sublimation, la couleur or. Ces opérations doivent être
interprétées comme différentes étapes de la vie intérieure, car le travail que
l’alchimiste réalise sur la matière dans le creuset est en réalité l’équivalent
du travail spirituel que le disciple doit réaliser sur sa propre matière, dans
ce creuset qu’est son corps. Chaque fois que l’esprit descend s’incarner dans
un corps humain, c’est le mystère de la mort du Christ sur la croix qui se
répète. La matière, synthèse des quatre éléments, est la croix sur laquelle
l’esprit du Christ ne cesse de se sacrifier.
Lorsque la matière alchimique
"ressuscitée" sort du creuset, elle est transformée en or. Et de même
l’homme ressuscité sort de la croix, cette croix qui correspond dans le plan
psychique aux quatre éléments terre, eau, air et feu qu’il doit apprendre à
maîtriser, purifier et transformer en lui. Et cette transformation ne peut se
faire qu’en passant par la mort, non pas la mort physique mais celle dont
parlait Jésus quand il disait :"Si le grain de blé qui est tombé en
terre ne meurt, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de
fruit". Cette phrase peut être considérée comme un résumé du travail
alchimique.
Dans la nouvelle vie que le Christ nous
propose, il n’est pas préconisé de s’attarder sur le supplice de la croix, car
le Christ se manifeste aussi par la beauté, la grandeur, la joie. Soyez
tranquille, Jésus ne s’offensera pas de ce que vous ne restiez pas fixé sur son
supplice. Il veut des hommes nouveaux qui se concentrent sur la lumière, sur la
gloire du Christ. Que cette lumière était belle, lorsque Jésus fut transfiguré
sur le mont Thabor devant ses disciples ! Son visage resplendit comme le
soleil. Une nuée lumineuse les recouvrit tous et une voix à travers la nuée fit
entendre ces paroles : "Celui-ci est mon fils bien-aimé, en qui j’ai
mis toute mon affection : écoutez-le" !
Dans la nouvelle culture, c’est cette
pensée de la gloire du Christ qui nourrira notre vie intérieure. Dieu se
réjouira en voyant que nous cessons de préférer la souffrance et la mort,
d’embrasser la poussière et de nous agenouiller devant des tombeaux, car il
nous destine à un avenir plus grandiose. Et s’il existe des morts dont il faut
s’occuper, ce ne sont pas ceux du cimetière, mais ceux qui sont enfouis dans
notre matière psychique : nos instincts primitifs, nos conceptions
erronées. Ce sont ces morts qu’il faut chercher pour en finir avec eux !
Jésus n’a pas trouvé en son temps des
conditions favorables pour manifester pleinement son savoir et sa puissance.
C’est ce que le Maître Peter Deunov
a exprimé un jour en disant : "Dans le passé le Christ était petit,
c’est pourquoi on l’a crucifié. Mais maintenant, quand il viendra, on ne pourra
plus le crucifier, car il n’y aura pas d’arbre assez grand pour lui dresser une
croix. Réjouissons-nus donc que le Christ soit devenu très grand, très
puissant, car il n’y aura plus de croix pour lui". Vous êtes peut-être
choqué par cette idée que si Jésus a été crucifié, c’est parce qu’il était
petit ? Celui qui a dit : "Je suis la lumière du monde.. Je suis
la résurrection et la vie… Mon Père travaille et moi aussi je travaille avec
lui…" Ne pouvait pas être petit. C’est vrai, mais je vais vous expliquer.
Considérons un enfant qui vient de
naître. L’esprit qui s’est incarné en lui est-il petit ? Non, il est grand
puissant, mais le corps dans lequel il s’engouffre est celui d’un bébé, si bien
qu’il lui est difficile d’y pénétrer et de s’y installer pour manifester toutes
ses possibilités. De la même façon quand l’esprit du Christ est descendu sur la
terre, il était grand, aussi grand qu’il l’a toujours été. C’est son corps qui
était petit, c’est à dire que ceux qui l’entouraient n’ont pas pu se laisser
pénétrer assez profondément par lui. C’est à cause de cette insuffisance, de
cette faiblesse des membres du corps du Christ, incapables de recevoir et de
réaliser sa grandeur, sa puissance, son immensité, que Jésus a pu être
crucifié. Bien sûr, la foule criait "Hosonna" au moment où il est
entré dans Jérusalem, mais lorsqu’il a été arrêté, au jardin de Gethsémani,
même ses disciples l’ont abandonné. C’est donc dans ses disciples que jésus n’a
pas pu avoir de puissance, c’est en eux qu’il était petit et ne pouvait donc
pas affronter les autres, tellement plus nombreux, décidés à l’anéantir.
Maintenant au travers des siècles,
l’esprit du Christ s’est étendu peu à peu dans le monde entier. On ne peut plus
le crucifier parce qu’il est incarné dans un corps immense, abrité dans les
coeurs et les intelligences de millions d’êtres. On ne peut le crucifier en
tous. Oui, c’est là une forme d’incarnation qu’il faut comprendre. Pour
travailler sur l’humanité un grand Maître a besoin d’un corps collectif. Tels
de ses disciples sont les yeux, les oreilles ou la bouche de cet organisme,
tels autres le cerveau, le cœur, l’estomac, les poumons, les bras, les jambes.
Tant qu’l ne peut pas animer ce corps collectif, le Maître est petit. A travers
un corps délabré, animal, grossier, l‘esprit éprouve de grandes difficultés
pour s’exprimer sous forme d’amour, de sagesse et de beauté.
L’esprit d’un Maître fait donc des
efforts pour s’incarner, non seulement dans son propre corps physique, mais
aussi dans le corps collectif d’une communauté spirituelle afin qu’elle ne
cesse de se développer dans la lumière. Mais ce corps collectif doit, en
retour, faire autant d’efforts pour aider l’esprit du Maître à s’incarner et se
manifester en lui. C’est pourquoi, au lieu de rester fixé sur le corps de Jésus
cloué sur une croix, un chrétien doit avoir pour unique préoccupation de se
préparer à devenir une parcelle purifiée et lumineuse de corps collectif que
l’esprit du Christ travaille à animer. Il y a deux mille ans, Jésus est mort
crucifié, c’est un fait, on ne peut revenir là-dessus ; mais c’est à nous
maintenant de renforcer le corps du Christ pour que son esprit continue à
travailler puissamment dans le monde.
Omraam
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