« Que la lumière soit ! »
D'après le
récit de la Genèse, c'est au moment où Dieu a prononcé ces mots que la création
a commencé. Cela signifie- t-il qu’aucune lumière n'existait auparavant? Et
comment le Verbe divin a-t-il pu la créer? C'est là encore que le tableau de
l'Arbre séphirotique, l'Arbre de la Vie, nous aide à comprendre.
Avant que Dieu ne dise: « Que la lumière
soit! » cette réalité que nous appelons la lumière n'existait que sous une
forme que nous ne pouvons pas concevoir: Aïn Soph Aur. Et la « parole » de
Dieu, qui n'a évidemment aucun rapport avec ce que nous pouvons, nous, appeler
parole, n'est qu'une façon d'exprimer l'idée que, pour créer, Dieu a projeté
quelque chose de Lui- même. C'est cette projection qui était Lui, mais une
forme nouvelle de Lui, que nous appelons la lumière. Dire que Dieu a « parlé »
signifie qu'il a eu la volonté de se manifester. Vous pensez que c'est très
difficile à comprendre... Non, prenons un exemple de la vie quotidienne. Vous
avez une idée, mais où est cette idée? Où la situer? Est-ce qu'on peut la voir
et la localiser quelque part dans votre cerveau? Non. Et on est obligé de
reconnaître aussi qu’on ne sait pas de quelle matière elle est faite. Mais au
moment où vous exprimez cette idée par la parole, déjà on commence à percevoir
son existence. Et enfin, quand vous agissez conformément à cette idée, elle
s'incarne dans la matière, elle devient visible. La parole est un intermédiaire
entre le plan de la pensée pure et celui de la réalisation dans la matière. Vous
avez là une image du processus de la création.
Maintenant, si on rapproche la phrase de
la Genèse: « Dieu dit: Que la lumière soit! » et la première phrase de
l'Evangile de saint Jean: « Au commencement était le Verbe et le Verbe était
avec Dieu et le Verbe était Dieu », on comprend mieux encore ce rapport qui
existe entre le Verbe et la lumière. La lumière est la substance que le Verbe
divin, le premier-né de Dieu, a fait apparaître pour devenir la matière de la
création. Vous direz que lorsqu’on regarde les pierres, les plantes, les
animaux et même les humains, on ne voit pas qu'ils sont faits de lumière. Oui,
parce que cette lumière en eux s'est condensée au point d'en devenir opaque. Et
si on oppose généralement matière et lumière, c'est parce qu'on ignore que ce
que l'on appelle matière est en réalité de la lumière condensée.
La Kabbale enseigne que Dieu a créé le
monde par condensations successives. Pour sortir de cette immensité, de cet
abîme insondable, de cet espace sans limite à travers lequel II était répandu,
Aïn Soph Aur, l'Absolu, l'inconnaissable s'est imposé des limites, puis
débordant de ces limites II a formé un réceptacle qu'il a rempli de ses
émanations. Ce réceptacle, c'est Kéther, la première séphira. Kéther est la
première manifestation d'Aïn Soph Aur, le non-manifesté. A partir de là on peut
dire que toute la création n'est qu'une succession de jaillissements et de
débordements de la lumière originelle. Kéther en débordant a formé Hohmah:
Hohmah est comme un récipient qui s'est rempli de l'eau de Kéther. En débordant
elle s'est déversée dans Binah, Binah dans Hessed, Hessed dans Gébourah,
Gébourah dans Tiphéreth, Tiphéreth dans Netsah, Netsah dans Hod, Hod dans Iésod
et Iésod dans Malhouth. Et au fur et à mesure qu'elle est descendue pour former
de nouveaux mondes, l'émanation divine est devenue de plus en plus dense. Mais
c'est toujours la même quintessence qui crée sans cesse de nouvelles forces, de
nouvelles couleurs, de nouvelles mélodies, de nouvelles formes... D'émanation
en émanation Dieu a créé toutes les séphiroth et c'est ainsi que la vie
continue à couler de la Source infinie.
« Au commencement était le Verbe, et le
Verbe était avec Dieu et le Verbe était Dieu... En Lui était la vie et la vie
était la lumière des hommes. » Pour que Kéther fasse jaillir la vie, il faut
qu'elle la reçoive de plus haut. Elle la reçoit de Aïn Soph Aur, Aïn Soph Aur
de Aïn Soph, et Aïn Soph de Aïn, l’absence qui attend le
moment de devenir présence...
Il existe donc une relation
ininterrompue entre l'Absolu et Dieu manifesté, et c'est ainsi que quelque
chose de nouveau s'introduit sans cesse dans l'univers.
L'univers est une création continue et
sa matière augmente et se transforme sans cesse. Comment s'établit ce contact
entre l'Absolu et Dieu manifesté? Nous n'en savons rien. Oui, et que le
Seigneur me pardonne de m'enfoncer dans de telles questions, car il faut oser
avouer que personne ne sait rien sur ce point. Alors, direz-vous, pourquoi en
parler? Parce que, dans la mesure où nous sommes créés à l'image de Dieu, à
l'image de l'univers, quelque chose en nous qui échappe à notre conscience peut
saisir quelques parcelles de cette réalité...
La vie n'est qu'un transvasement
d'énergies, c'est pourquoi on trouve aussi dans la tradition kabbalistique
l'image du fleuve de la vie qui jaillit de la Source divine et descend pour
alimenter toutes les régions de l'univers.
De Kéther à Malhouth les séphiroth sont
les vases sacrés que remplit la Source inépuisable de la vie. L'arbre et le
fleuve sont donc deux images complémentaires qui traduisent le jaillissement et
l'écoulement de la vie. Vous direz: « Mais l'arbre prend racine en bas, alors
que le fleuve prend sa source en haut. » Oui, dans notre monde matériel les
arbres ont leurs racines en terre, mais l'arbre cosmique prend racine en haut.
Reprenons maintenant l'image du fleuve,
en gardant toujours à l'esprit qu'il ne s'agit justement que d’une image
destinée à traduire un aspect de la réalité. Mais la réalité elle-même est
beaucoup plus complexe et il faut donc, pour la comprendre, y introduire de
nouveaux éléments.
Puisque les séphiroth sont réparties sur
trois piliers, cela signifie que le fleuve de vie ne s'écoule pas en droite
ligne de haut en bas. Nous l'avons vu, de part et d'autre du Pilier central se
dressent le Pilier de la Clémence polarisé positivement et celui de la Rigueur polarisé
négativement. En passant d'une séphira à l'autre, l'émanation divine change
donc de polarité. Ce qui explique que tout en se succédant les unes aux autres,
les séphiroth paraissent de nature opposée. A Hohmah par exemple qui représente
l'harmonie, l'amour universel, succède Binah qui représente la rigueur
implacable des décrets divins. A cette intransigeance de Binah, succède la clémence de Hessed, à
la clémence de Hessed, l'audace combative de Gébourah, etc. Et comme chaque
séphira correspond à un attribut divin, à une vertu divine, c'est ce qui
explique que les adjectifs que l'on applique à Dieu soient aussi différents et
apparemment contradictoires: miséricordieux, terrible, doux, jaloux, fidèle,
vengeur... Ils expriment les caractères opposés des deux piliers.
Omraam
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