Si vous demandez à un Initié pourquoi le
mal existe, il ne vous donnera pas de réponse. Et si vous lui demandez ce que
vous devez faire pour le supprimer, il vous enseignera seulement comment le
considérer afin de travailler avec lui, sur lui. C’est le sens de la parabole
évangélique de l’ivraie et du froment.
Des serviteurs viennent dire à leur maître que de l’ivraie a poussé dans le
champ de blé qu’il avait fait semer et ils lui proposent de l’arracher. Mais le
maître répond : « Non, de peur qu’en arrachant l’ivraie, vous ne
déraciniez en même temps le blé. Laissez croître ensemble l’un et l’autre
jusqu’à la moisson ».
Le blé et l’ivraie sont les symboles de
réalités qui n’existent pas seulement dans le domaine végétal, mais aussi parmi
les animaux et jusque dans la société des hommes. Le blé symbolise tout ce qui
est bon, utile, nourrissant ; tandis que l’ivraie, qui est une herbe nuisible
aux céréales, symbolise le mal. Et le mal, les humains sont toujours prêts à le
combattre, car ils pensent pouvoir l’anéantir ; ils ne cessent de pousser
des cris contre les vices et les mauvaises actions de leurs semblables, et leur
langage est rempli d’expressions où il est toujours question d’extirper,
d’arracher, d’éliminer, d’écraser, etc. Mais depuis que le monde existe on
n’est jamais arrivé à extirper le mal ni à anéantir tous les êtres mauvais… et
on n’y arrivera jamais.
La vérité, c’est que l’existence du mal
est une question inextricable. Et de l’être humain lui-même on doit s’attendre
au meilleur comme au pire, parce que tout en étant une entité unique il possède
par essence deux natures ; une nature supérieur qui reflète les puissances
lumineuses de l’univers, et aune nature inférieure qui reflète les puissances
ténébreuses ; Alors, suivant que l’une ou l’autre se manifeste, il y a de
quoi être émerveillé ou horrifié. Chaque jour les occasions ne manquent pas de
e se poser des questions : « Comment cette personne a-t-elle pu se
conduire aussi magnifiquement ? » Et d’autre : « Mais c’est
un monstre, comment est-ce possible ? » Eh bien, oui, tout est
possible ; on est obligé de constater que non seulement il existe sur la
terre des êtres moralement si dissemblables qu’on se demande presque s’ils
appartiennent à la même espèce humaine, mais encore, dans une même personne
aussi, on peut voir se manifester tour à tour le ciel et l’enfer.
Le champ de blé de la parabole est une
image du monde, et l’ivraie et le froment représentent les méchants et les gens
de bien qui sont obligés de vivre ensemble. Impossible d’échapper à cette
situation. Vous direz qu’il n’existe qu’un très petit nombre de personnes sur
la terre dont on peut dire qu’elles sont tout à fait bonnes ou tout à fait
mauvaises ; la majorité se situe entre les deux. C’est vrai. Mais ce qui
est encore plus vrai, c’est que beaucoup, qui pensent faire partie des gens de
bien, se donnent le droit de juger les autres, de les condamner, de les combattre,
de les tenir à l’écart, et ils commettent des erreurs.
Dans le monde comme dans chaque être
humain, le bien et le mal sont si étroitement enchevêtrés que si nous voulons
arracher le mal, nous risquons en même temps d’arracher le bien. Dans la Table
d’Emeraude, Hermès Trismégiste dit : « Tu sépareras le subtil de
l’épais avec grande industrie ». Mais y a-t-il beaucoup de gens qui sont
capables de séparer le subtil (le bien) de l’épais (le mal) ? La meilleure
solution, c’est de laisser le bien et le mal vivre ensemble et de chercher à
utiliser les forces extraordinairement puissantes contenues dans les éléments
du mal, c’est à dire de prendre d’elles quelques doses infinitésimales pour
augmenter et intensifier les forces du bien. Oui, ne pas arracher le mal, mais
le mettre au service du bien.
C’est
déjà ce que nous pouvons faire dans notre vie psychique, ainsi que je
vous l’ai plusieurs fois expliqué en vous donnant l’image de l’arbre. Car
l’être humaine st semblable à un arbre qui, grâce à la lumière du soleil
spirituel, peut transformer en lui la sève brute, ses tendances instinctives,
en sève élaborée qui ira nourrir les fleurs et les fruits de son âme et de son
esprit ; Combien de fois les forces du mal se permettent de détourner les
forces du bien pour les faire servir à leurs desseins ! Alors pourquoi le
bien n’aurait-il pas le droit de prendre les forces du mal pour les transformer
et les mettre au service d’un idéal élevé ? Non seulement il en la droit,
mais il en a même le devoir. Cette relation qui existe en nous entre le haut et
le bas existe aussi dans la société, car la société est elle-même un immense
organisme où nous pouvons découvrir les mêmes mécanismes que pour l’individu,
et donc appliquer les mêmes règles. C’est cette science que possédait Jésus. Il
connaissait la nécessité d’une circulation entre les mondes inférieur et
supérieur, et c’est pourquoi il ne cessait de rencontrer les gens simples, les
pécheurs, les criminels même ; Les pharisiens et les sadducéens, eux,
croyaient manifester une supériorité morale et spirituelle en se tenant loin du
peuple, et ils condamnaient la conduite de Jésus ; leur orgueil leur
suffisance, leur manque d’amour les empêchaient de voir les raisons profondes
de son attitude.
Bien sûr, ces faits se sont déroulés il
y a deux mille ans, mais ce n’est pas une raison pour éviter d’y réfléchir, car
ils posent des questions qui sont toujours d’actualité. Celui qui ne veut
fréquenter que des personnes distinguées, instruites et vertueuses ne peut pas
évoluer, car il n’est pas un bun alchimiste. Il ne cherche pas à utiliser les
énergies contenues dans les racines, il ne cherche pas à transformer le plomb
en or, et il se prive donc de beaucoup de choses. Nous n’évoluerions pas si les
différentes parties, plus nobles ou moins nobles, de nos organismes physique et
psychique ne communiquaient pas entre elles ; de même, pour évoluer, les
humains de toutes les catégories doivent pouvoir entrer en relation les uns
avec les autres. Les inégalités qu’on voit se manifester parmi eux ne sont que
superficielles et passagères ; leurs qualités physiques,
intellectuelles, morales, spirituelles,
les événements de leur existence, tout ce qui fait que dans un domaine ou dans
un autre les uns semblent privilégiés et les autres non, correspond seulement à
un moment de l’évolution. [ …]
A la différence des Pharisiens ou des
Brahamanes de l’Inde qui, se considérant comme une élite spirituelle,
méprisaient le peuple et le tenaient à distance pour ne pas être souillés,
Jésus ne craignait pas ce contact. Pourquoi ? Parce qu’il était lui,
réellement pur. Les êtres d’une grande pureté sentent qu’ils peuvent aller
partout et fréquenter n’importe qui, ils n’ont pas peur d’être salis par les
autres. Leur amour est plus fort que tout et c’est cet amour qui les rend
capables de transformer les impuretés autour d’eux. Donc, contrairement à ce
que croient encore beaucoup trop de gens, se tenir à l’écart des déshérités,
des faibles et des pécheurs n’est pas un signe d’évolution.
Je ne dis pas cela pour vous pousser à
vivre parmi les malfaiteurs, les débauchés ou les malades mentaux. Le désir
d’aider les êtres ne suffit pas pour les arracher à leurs vices ou à leurs
faiblesses, et combien de fois on a vu des personnes animées d’intentions
généreuses se laisser entraîner aussi bas que ceux qu’elles voulaient
sauver ! Elles avaient présumé de leurs forces. Pour transformer les
êtres, il faut d’abord avoir appris à faire ce travail de transformation sur
soi-même. Et comment ? Déjà, tout simplement, en apprenant comment manger.
Eh oui !
L’estomac est une usine où se transforme
la matière brute que nous absorbons : les aliments. C’est là, dans notre
estomac, que se trouvent les racines de notre être physique. Cette matière
première que nous donnons à l’estomac s’élabore ensuite dans les poumons, le
cœur et le cerveau. Elle devient ainsi sentiments, désirs, pensées. Et ces
sentiments, ces désirs et ces pensées redescendent à leur tour dans l’organisme
pour nourrir les cellules de leurs énergies subtiles. C’est ainsi que se font
des échanges permanents entre le côté physique et le côté spirituel de notre
être ; sans ces échanges, sans cette circulation des énergies, nous
mourrions. Il ne faut pas s’imaginer que le corps physique peut fonctionner
indépendamment des pensées, des sentiments et des désirs qu’entretient l’être
qui est en possession de ce corps ; le corps physique n’est pas uniquement
une machine, il entretient des relations avec nos corps subtils, et plus nous
arrivons à harmoniser ces relations, plus nous le renforçons.
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