Il faut commencer par le commencement,
et le commencement, c’est l’homme lui-même. La véritable synarchie s’installera
le jour où chacun deviendra le roi de son propre royaume, et d’abord de ses
pensées, de ses sentiments et de ses désirs. Oui, et surtout de se désirs. Car aussi longtemps
que les humains n’auront pas de vrais critères pour analyser l’origine de leurs
exigences et de leurs revendications, la scène politique restera un lieu
d’affrontements. Combien de fois au cours de l’histoire ont-ils fait
l’expérience des changements de régime et des révolutions. Mais la situation ne
s’est pas vraiment améliorée pour autant. Et pourquoi ne s’est-elle pas
améliorée ? Parce que ces changements n’ont pas été décidés par des gens
qui avaient la volonté de s’arracher à leurs instincts, à leurs convoitises.
Tant qu’il n’y a pas d’évolution dans les consciences, dans les mentalités,
quelles que soient les réformes qu’on envisage, il ne peut y avoir aucun
progrès réel.
La sagesse des peuples s’est souvent
exprimée par des contes. Alors, il était une fois un royaume où ne se
produisaient que des émeutes, des épidémies, des famines. Le roi, ne sachant
que faire, fit venir un sage pour l’interroger. Et le sage lui répondit :
"Majesté, c’est toi qui es la cause de tous ces maux. Tu vis dans la
débauche tu es égoïste, injuste, cruel, et voilà pourquoi des catastrophes ne
cessent de tomber sur ton peuple". Ensuite, le sage se présenta devant le
peuple et lui dit : "Si vous souffrez, c’est que vous l’avez
mérité : par vos désordres, votre paresse, vous avez attiré un monarque
qui vous ressemble et qui fait votre malheur". Voilà comment les sages
expliquent les choses. Lorsque les citoyens d’un pays décident de vivre dans la
lumière de l’esprit, ils attirent des gouvernants nobles et honnêtes qui
n’apportent que des bénédictions. Mais si une nation a des dirigeants qui
donnent libre cours à leurs pires caprices aux dépens du peuple, eh bien, il
faut que le peuple se dise qu’il en porte aussi une part de
responsabilité.
En réalité, c’est la société tout
entière qui encourage les tendances inférieures de ses membres. Même les
parents sont tellement ignorants qu’ils s’imaginent éduquer leurs enfants en
les poussant à obtenir des faveurs et des privilèges par des moyens plus ou
moins licites. C’est cela pour eux, l’éducation. Au lieu de dire à un
enfant : « Prépare-toi ; si un jour tu as des responsabilités
importantes, tu devras te montrer à la hauteur de ta tâche, ne jamais te
compromettre », ils le poussent à "se débrouiller" par tous les
moyens et ils se réjouissent de ses succès, même s’il ne les mérite pas. C’est
toujours dans les plans matériels qu’on cherche la réussite, et pour y arriver
on n’hésite pas à employer les calculs, la ruse, la violence. Ce n’est pas que
la réussite matérielle soit en soi
condamnable, non mais elle ne se justifie que dans la mesure où elle est
la concrétisation d’un travail réalisé dans le plan spirituel.
Vous direz : "Oui, mais si on
doit se conduire d’après vos conseils, si on doit tellement se préparer, les
conditions dans le monde sont telles qu’on restera quelque part, inconnu,
obscure, privé de tout moyen d’action". Eh bien, sachez que pour tirer des
conclusions pareilles, c’est que vous ne connaissez rien des lois divines.
Quand vous deviendrez véritablement capable, un modèle, même si vous ne le
voulez pas, même si vous refusez, les autres viendront vous saisir de force et
vous placeront au sommet pour les conseiller, les guider. Si cela n’arrive pas,
c’est que vous ne le méritez pas ; vous n’êtes pas encore au point, vous
n’avez donc pas à protester.
Par essence, les êtres humains ne sont
pas les uns bons et les autres mauvais. Tous sont faits de deux natures :
inférieure et supérieure, donc tous ont des aspirations vers le monde divin,
vers la lumière, l’amour, la pureté. Seulement, ce sont des aspirations qu’ils
ont plus ou moins développées et qui sont plus ou moins favorisées par le milieu
ambiant. C’est pourquoi chacun doit avoir pour première préoccupation de
développer ses aspirations spirituelles et de donner aux autres les
possibilités de les développer aussi. Il faut une telle force de caractère pour
résister aux pressions de l’entourage ! Lorsqu’ils se voient entourés de
brigands et de rapaces, beaucoup se découragent et commencent à les imiter en
adoptant cette philosophie tellement répandue : "L’homme est un loup
pour l’homme"… "Faites du bien et vous recevrez du mal"…
"Soyez honnête et vous mourrez de faim"… C’est ainsi que de plus en
plus, chacun se nivelle, se conforme aux créatures les plus inférieures.
Il est important de réfléchir sur ces
questions, et c’est d’autant plus important qu’elles concernent l’éducation de
la jeunesse. Les enfants et les adolescents d’aujourd’hui sont les futurs
citoyens. Beaucoup ont le désir de travailler pour un idéal de générosité, de
fraternité, mais au bout de quelque temps, au contact de la réalité, sous la
pression de leur entourage qui leur conseille d’être "raisonnables",
"réalistes", ils y renoncent. Et c’est normal : à cet âge-là ils
ont besoin d’être soutenus dans leurs bons désirs, dans leurs bons élans. Et
s’ils n’ont pas des instructeurs, des modèles pour les conseiller et les
empêcher de retourner en arrière, après quelques moqueries, quelques obstacles
et quelques désillusions, ils finissent par devenir comme les autres.
S’il y avait davantage de créatures qui
travaillent avec désintéressement et abnégation pour le bine de tous, la face
du monde serait changée. De tels êtres, bien sûr, ont toujours existé,
l’histoire nous en a conservé le souvenir, et c’est grâce à eux que l’humanité
a pu tout de même survivre et progresser. Il en existe encore de nos jours,
mais ils sont si peu nombreux en comparaison de tous ces fauves qui peuplent la
terre et donnent libre cours à leurs instincts ! Et quand par malheur ces
fauves-là ont des responsabilités politiques dans un pays, ils ne peuvent faire
que des victimes.
Si le Royaume de Dieu n’est pas encore
venu sur la terre, c’est que la plupart des gens travaillent pour une politique
inspirée par la nature inférieure. Et cela est vrai de ceux qui gouvernent
aussi bien que de ceux qui sont gouvernés. Oui, quand j’analyse les buts de la
politique, je vois qu’ils sont toujours médiocres. Ah ! évidemment ils
sont présentés un peu embellis et ornés, mais en réalité il ne s’agit trop
souvent pour les hommes politiques que d’obtenir le pouvoir en promettant à
ceux qui vont les élire qu’ils s’efforceront de satisfaire leurs désirs et
leurs besoin, même si ces désirs et ces besoins ne tiennent pas compte du bien
de tous. Et la foule qui se rue pour les écouter applaudit sans discernement.
C’est ainsi que des aveugles sont dirigés par d’autres aveugles ; mais vous
connaissez la parabole évangélique : "Des aveugles conduits par
d’autres aveugles, tous tombent dans la précipice". Malheureusement, il
est toujours trop tard quand on se rend compte de cet aveuglement : les
catastrophes sont déjà là. Regardez Hitler, regardez Staline, et tant
d’autres : quels bourreaux, quels monstres ! et des foules entières
qui les suivaient et les acclamaient… !
Moi aussi je travaille pour une
"politique", mais pour une politique inspirée par la nature supérieur
et qui tienne compte des besoins essentiels de l’être humains, des besoins de
l’âme et de l’esprit. Même Karl Marx qui est tellement glorieux, tellement
prôné, tellement suivi, eh bien, il va faire faillite lui aussi d’ici quelque
temps, avec toute sa compagnie. Oui, parce qu’on ne résout pas tous les
problèmes des humains par la lutte des classes, la collectivisation des moyens
de production, etc. que Karl Marx ait été un génie, ça c’est sûr, personne ne
peut le nier, mais qu’il n’ait pas tout prévu parce que son point de vue à lui
était également limité, c’est sûr aussi. Je reconnais qu’il faut des gens
qualifiés dans chaque domaine de la vie politique, économique et sociale, mais
ces gens qualifiés ont besoin d’être orientés par d’autres qui n’ont peut-être
aucune de ces qualifications, mais qui connaissent l’essentiel.
Vous êtes étonné ? Mais prenez mon
cas, par exemple. Il n’existe pas un homme sur la terre qui soit aussi ignorant
que moi dans les domaines politique, économique, financier. Je sais seulement
une chose, une seule, mais essentielle : comment faire couler l’eau, c’est
tout. Et l’eau ensuite trouvera son chemin. A ce moment-là, toute une culture
va apparaître et se mettre en place : les plantes, les animaux, les
hommes… Il faut faire couler l’eau sans s’occuper du reste. C’est ce que je
fais, ici avec vous, dans notre Fraternité : je m’occupe de faire couler
l’eau et c’est vous, oui vous, qui trouvez chacun votre place. Ce n’est pas à
moi de vous trouver une place, je ne dois pas m’occuper de cela. C’est pourquoi
je n’ai rien cherché à organiser. Je ne m’occupe que de l’eau, car s’il y a de
l’eau, les choses finissent par s’organiser d’elles-mêmes. Et cette eau, c’est
l’amour, c’est la vie !... Tant que les hommes politiques croient que pour
améliorer la situation il suffit de mettre en place de nouvelles institutions,
de créer de nouvelles structures ou de nouveaux ministères, ils n’arriveront à
rien, car ils ont oublié l’eau ! Tout ce qu’ils pourront organiser extérieurement se révélera
inefficace aussi longtemps qu’ils ne s’occuperont pas de faire couler
l’eau. Quelle que soit l’organisation,
il est nécessaire qu’il y ait, au sommet, un être qui possède cette eau, cet
amour, pour que tous les autres prennent exemple de cet amour, s’inspirent de
cet amour. A ce moment-là toutes les branches de toutes les activités
s’agenceront naturellement pour contribuer au succès de l’entreprise.
Autrement, bien sûr, je ne suis quand même pas un bébé pour ne pas comprendre
combien l’organisation de tout un pays doit être quelque chose de complexe.
Oui, mais pour que cet ensemble fonctionne, il faut l’amour, et quand je parle
d’amour, je veux dire cet état de conscience qui permet d’envelopper tous les
êtres dans la même bienveillance et de comprendre leurs besoins.
Regardez ce qui se passe dans une
réunion où des personnes se retrouvent pour décider d’un projet. Si elles sont
bien disposées les unes envers les autres, elles se comprendront, et à la fin
de la réunion, tout sera au point et le projet se réalisera. Mais si elles
viennent avec l’unique volonté de faire triompher leur point de vue parce que
chacune s’estime seule dans le vrai, elles ne trouveront jamais de solution. Et
c’est souvent ce qui se passe : les gens se réunissent une fois, deux
fois, trois fois… dix fois, et rien ne sort de ces réunions, excepté des
malentendus et des querelles. Alors à quoi riment toutes ces comédies ?
Mais on dirait que les humains ont
encore besoin de souffrir. Oui, il n’y a pas d’autre explication : les
humains ont encore besoin de souffrir. Vous trouverez que je suis cruel ?
Non, je suis réaliste, je tire des conclusions de ce que j’observe ; cela
me rend malheureux de le constater, mais les humains ont encore besoin de
souffrir pour comprendre. Jusqu’au jour où, à cause de ces souffrances, grâce à
ces souffrances, ils trouveront le chemin. Les annales de la Science
initiatique rapportent que beaucoup d’humanités déjà ont disparu. Certaines
parmi elles possédaient des techniques beaucoup plus avancées que les
nôtres ; elles ont disparu parce qu’elles ont utilisé ces techniques pour
dominer par la violence, et c’est elles-mêmes qui se sont détruites. Et ce qui
est un très mauvais présage pour l’avenir de l’humanité, c’est qu’on voit de
plus en plus le progrès technique fournit des moyens de destruction. Alors, il
faut réfléchir. L’Intelligence cosmique, qui vit dans l’éternité, n‘en est pas
à une humanité près. Tellement d’autres ont disparu que, si celle-là disparaît
aussi par sa propre faute, cela ne la troublera pas beaucoup : avec les
quelques individus qui resteront, elle en préparera une nouvelle. C’est à nous
de ne pas nous détruire. Si nous nous entêtons à tout faire pour être détruits,
l’Intelligence cosmique restera imperturbable, elle n’interviendra pas, elle
nous laissera faire.
Omraam.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire