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lundi 13 janvier 2014

l’Alphabet cosmique



Il est écrit dans le premier livre du Zohar : « Déjà deux mille ans avant la création du monde, les lettres étaient cachées, et le Saint, béni soit-il, les contemplait et en faisait ses délices ». Et lorsqu’il voulut créer le monde, toutes les lettres, mais dans l’ordre inversé, vinrent se présenter devant Lui. C’est ainsi que Tav, Shin, Resch, Qof, Tsadé, Pé, Aïm, Samesch, Nun, Mem… s’avancent l’une après l’autre devant le Créateur et Lui exposent les qualités qui les rendent dignes d’être les instruments de sa création. Mais Dieu les renvoie. Lamed, Kaf, Iode, Teth, Heth, Zaïm, Vav, Hé, Daleth, Ghimel, se présentent à leur tour, et Dieu les renvoie aussi. Enfin, se présente la lettre Beth, la deuxième lettre de l’alphabet, et Dieu lui dit : « C’est effectivement de toi que je me servirai pour opérer la création du monde et tu seras ainsi la base de l’œuvre de la création ». C’est pourquoi les deux premiers mots de la Genèse, en hébreu : « Béréchit bara » commencent par la lettre Beth.

Vous direz : « Et la lettre Aleph ? Pourquoi n’est-elle pas mentionnée ?» Ah, la lettre Aleph, Dieu lui a donné un destin spécial « La Lette Aleph, dit le Zohar, resta à sa place sans se présenter. Le Saint, béni soit-il, lui dit ; « Aleph, Aleph, pourquoi ne t’est-tu pas présentée devant moi, à l’instar de toutes les autres lettres ? » Elle répondit : « Maître de l’Univers, voyant toutes les lettres se présenter devant toi inutilement, pourquoi me serais-je présentée aussi ? Ensuite, comme j’ai vu que tu as déjà accordé à la lettre Beth ce don précieux, j’ai compris qu’il ne sied pas au Roi céleste de reprendre le don qu’il a fait à un de ses serviteurs, pour le donner à un autre ». Le Saint, béni soit-il, lui répondit : « O Aleph, Aleph, bien que ce soit la lettre Beth dont je me servirai pour opérer la création du monde, tu auras des compensations, car tu seras la première de toutes les lettres, et je n’aurai d’unité qu’en toi ; tu seras la base de tous les calculs et de tous les actes faits dans le monde, et on ne saurait trouver d’unité nulle part, si ce n’est dans la lettre Aleph ». La première lettre, Aleph, représente donc le principe créateur, la force primordiale, le nombre 1, et Beth représente la matière, le nombre 2.

Depuis des siècles, ces vingt-deux lettres de l’alphabet hébraïque sont pour les kabbalistes un sujet inépuisable d’études et de réflexions. Car ils ne voient pas en elles de simples lettres, mais des puissances, des éléments par la combinaison desquels Dieu a créé l’univers.

Parce que la parole est quelque chose qui leur semble parfaitement naturel, les humains ont perdu le sens de son origine devine. Or, comment Moïse présente-t-il la création du monde dans la Genèse ? Dieu parle. Le premier jour Il dit : « Que la lumière soit ! »… Et Il appelle la lumière « jour » et les ténèbres « nuit »… Le deuxième jour Dieu dit : « Qu’il y ait une étendue entre les eaux »… et Il appelle l’étendue « ciel »… etc. Cette idée que Dieu a créé le monde par la parole se retrouve au début de l’Evangile de saint Jean : « Au commencement était la Parole ». Une autre traduction dit : « Au commencement était le Verbe » et c’est celle-là que nous choisirons, pour marquer la différence entre le Verbe divin et la parole humaine qui n’en est qu’un pâle reflet.

Dès qu’un enfant va à l’école, il commence à apprendre la grammaire. Et une des premières règles de cette grammaire, c’est qu’il faut au moins trois mots pour former une phrase ; le sujet, le verbe et le complément. Alors voilà : le sujet, l’être ; ensuite le complément, l’objet, ce qui est en dehors du sujet ; et entre les deux, le verbe qui est actif, puissant, et qui fait le lien. Toute la grammaire est basée sur ces trois fonctions que nous pouvons aussi voir dans le symbole du cercle. Le sujet, c’est le centre qui agit ; le complément, c’est la périphérie ; et le verbe, c’est celui qui remplit tout, qui est partout comme le cytoplasme de la cellule. Oui, le Verbe est sorti du centre, c'est-à-dire du Père, de la Cause primordiale… C’est le Christ, le Fils de Dieu. Vous voyez, tout se tient.

Saint Jean, qui a écrit son Evangile en grec, emploie le mot « logos » et « logos » ne signifie pas seulement verbe, parole, mais aussi intelligence, raison. Car qu’est-ce qu’une parole qui n’est pas intelligence, une parole qui n’est pas inspirée par la raison. Et « raison » n’est qu’un terme philosophique plus abstrait pour désigner la lumière. Donc, le Verbe proféré par Dieu est cette lumière qu’il a appelée au commencement pour créer le monde. C’est pourquoi saint Jean dit : « Et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était au commencement avec Dieu. Toutes choses ont été faites par lui, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans lui ».

Mais il y a encore là un point qu’il faut préciser. Je vous ai expliqué que Dieu, le Feu primordial, a tout d’abord créé la lumière, car de même que le feu est en relation avec l’esprit, la lumière a des relations avec la matière, mais pas avec la matière physique. C’est le son qui a une relation directe avec la matière physique et pour pouvoir la toucher, il faut que la lumière se transforme en son. C’est pourquoi il est dit que Dieu a « parlé ». Pour résumer, on peut dire qu’au commencement était le feu ; le feu s’est condensé pour donner naissance à la lumière et pouvoir travailler sur elle ; puis à son tour la lumière s’est condensée pour produire le son, qui a agi sur la matière physique. Et si les humains ont inventé l’écriture, c’est pour donner une forme plus matérielle au son, à la parole.

Ainsi, les 22 lettres de l’alphabet hébraïque ne doivent pas être uniquement considérées comme de simples caractères qui ont permis de fixer la parole. Chaque lettre est vivante, elle représente une puissance, et la forme qui lui est donnée correspond à une réalité dans les plans subtils, que ce soit une force ou une entité. C’est pourquoi les kabbalistes continuent à étudier ces lettres ; ils tâchent d’approfondir les correspondances qui existent entre leurs formes et les puissances d’en haut, et ils s’efforcent de comprendre leur maniement afin d’établir un lien entre la terre et le ciel.

Alpha et Oméga, ou Aleph et Tav… En réalité ces deux lettres ne sont pas séparées l’une de l’autre, elles représentent la totalité de l’alphabet, car on ne peut pas isoler la fin du commencement. Lorsqu’en parlant d’un être humain, on dit « la tête et les pieds » tout le reste du corps est compris, même si on ne le mentionne pas. Et es pieds sont toujours liés à la tête ; quand vous voyez quelqu’un marcher, c’est qu’il a un projet à réaliser, il ne marche pas pour rien, sans but, sans intention.

Un alphabet est un ensemble formé d’une succession d’éléments, les lettres, et l’ordre dans lequel elles sont placées n’est pas le fait du hasard, car elles sont la représentation analogique des « lettres » qui composent la création. En se servant des lettres de l’alphabet pour penser, parler et écrire, l’homme agit comme dieu, et c’est dans ce sens qu’on peut dire qu’il est un véritable scribe, car il a appris à combiner les lettres pour former des mots, des phrases, des poèmes ; ces mots, ces phrases, ces poèmes qui sont la matière même de l’univers. Oui, le scribe, au sens initiatique du terme, est celui qui sait transposer les éléments de la langue, les lettres de l’alphabet, dans tous les domaines de la vie et particulièrement en lui-même, où il s’efforce de combiner ces éléments afin qu’il en résulte une « parole » belle, harmonieuse et bénéfique pour tous les êtres autour de lui et pour l’univers entier.


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