Un
des symboles de la Justice est la balance. Etudiez donc comment les gens se
servent de la balance, et vous comprendrez beaucoup de choses.
Vous
allez au marché et vous vous arrêtez devant un étal pour demander un kilo de
cerises ; le vendeur les pèse : il y a deux ou trois cerises en trop,
et il les enlève… parce qu’il est juste, et vous n’avez rien à lui reprocher.
Vous recommencez avec un deuxième vendeur. Mais lui, il a faussé sa balance et,
pour un kilo, il vous donne quelques cerises en moins ; vous vous en
apercevez parce que vous les pesez à nouveau en rentrant chez vous, et vous
êtes très mécontent de cette injustice. Enfin, vous allez vers un troisième
vendeur et, comme c’est un homme généreux, il pèse le kilo de cerises, puis il
vous en rajoute encore une poignée. Alors, lui, est-il juste ou injuste ?
Il
est injuste, mais cette injustice vous plaît beaucoup !
Comment
se fait-il cette fois que vous appréciez tellement les gens injustes ? Il
existe donc une justice et deux injustices. L’injustice peut être bénéfique ou
néfaste, tandis que la justice n’est ni l’un ni l’autre.. elle est juste !
Et
voilà que moi, je prêche l’injustice. Oui, je prêche cette injustice qui
s’appelle amour. Car l’amour est la plus grande injustice : donner, aider,
réconforter quelqu’un, alors qu’il n’y a aucune raison de le faire ou même
qu’il ne le mérite pas, c’est injuste, mais cette injustice est tout à fait
recommandable. C’est pourquoi je prêche l’injustice, car elle seule pourra
sauver le monde. Tant qu’on agira d’après la justice, aucun problème essentiel
ne sera résolu. Il ne faut plus être juste :… Je veux dire : il faut
cesser d’avoir tellement recours à des lois pour faire valoir ses griefs ou son
bon droit.
Les
scribes et les pharisiens étaient d’ardents défenseurs de la Loi de Moïse, et
c’est au nom de cette loi qu’ils ne cessaient d’attaquer Jésus. Ils lui
reprochaient de ne pas imposer à ses disciples l’observance de rites concernant
le jeûne et les aliments dits "impurs", mais c’est aussi d’un très
mauvais œil qu’ils le voyaient fréquenter le petit peuple, accueillir auprès de
lui des pécheurs, des prostituées, guérir des malades le jour du sabbat, etc…
Mais
Jésus était venu enseigner qu’aucune loi ne peut nous interdire de manifester
la bonté, l’amour, l’indulgence, la compassion, le pardon. Un des passages les
plus connus de l’Evangile de saint Jean est celui où Jésus arrache la femme
adultère à la justice des scribes et des pharisiens qui allaient la lapider.
"Alors les scribes et les pharisiens amenèrent une femme surprise en
adultère ; et la plaçant au milieu du peuple, ils dirent à Jésus :
Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Moïse, dans la
loi, nous a ordonné de lapider de telles femmes : toi donc, que
dis-tu ? Ils disaient cela pour l’éprouver, afin de pouvoir l’accuser.
Mais Jésus, s’étant baissé, écrivait avec le doigt sur la terre. Comme ils
continuaient à l’interroger, il se releva et leur dit : Que celui de vous
qui est sans péché jette le premier la pierre contre elle. Et s’étant de
nouveau baissé, il écrivait sur la terre".
Qu’écrivait
jésus ? On ne l’a encore jamais révélé. Il traçait sur le sol des figures
et des signes sacrés de la tradition juive ; par ces signes dont ils
connaissaient le sens, Jésus rappelait aux scribes et aux pharisiens que s’ils
n’étaient pas irréprochables, le châtiment qu’ls infligeraient à cette femme
retomberait aussi sur eux. Et comme ils avaient tous plus ou moins trempé dans
des affaires louches, ils ont eu peur : l’un après l’autre, ils sont
partis en laissant Jésus avec la femme. "Alors rapporte l’Evangile,
s’étant relevé et ne voyant plus que la femme, Jésus lui dit : Femme, où
sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a-t-il condamnée ? Elle
répondit : Non, Seigneur. Et Jésus lui dit : je ne te condamne pas
non plus. Va maintenant, et ne pèche plus".
Il
y aurait, bien sûr, beaucoup de remarques à faire sur ce passage. D’abord que,
dans un cas d’adultère, ce n’était pas l’homme mais la femme seule qui devait
être condamnée, pourquoi ?... Ensuite, que l’adultère était considéré
comme une faute capitale puisqu’il méritait la mort. Et là encore,
pourquoi ?.... Mais laissons cela pour nous arrêter seulement sur
l’attitude de Jésus. Il ne répond pas directement aux scribes et aux
pharisiens, il se contente de leur dire : "Que celui de vous qui est
sans péché jette le premier la pierre contre elle".
Donc,
pour Jésus, l’adultère n’était pas un plus grand péché que les autres ;
tous les péchés sont des impuretés et les scribes et les pharisiens, qui
étaient aussi des pécheurs, n’avaient aucun droit d’accabler cette femme.
"Mais pourquoi, direz-vous, Jésus qui était pur, ne l’a-t-il pas
condamnée" ? Parce que la pureté ne s’occupe pas de condamner
l’impureté. Ceux qui sont purs ne s’occupent pas de l’impureté des autres, ils
sont au-dessus de cela. Par leur rayonnement, par leur lumière, ils tâchent
seulement de purifier et d’éclairer les autres, alors que ceux qui sont impurs
ne font que les salir. Si on savait seulement ce qui pousse certains êtres à
s’ériger en moraliste et en justiciers ! Ils poursuivent chez les autres
ce qu’ils ne veulent pas voir en eux. Pourquoi s’occuper toujours de ce que
font les autres ? Il faut laisser les humains à la justice de Dieu. S’ils
se conduisent mal, le Ciel les privera de ses bénédictions ; ce n’est pas
à nous de les poursuivre pour les juger. Maintenant, ne me comprenez pas mal….
Je
ne veux pas dire que l’on doit supprimer les juges, les tribunaux et les
prisons, et laisser les malfaiteurs tranquilles en attendant que la Justice
divine s’occupe d’eux un jour. Non, que les juges et les tribunaux fasse leur
travail… et qu’ils s’efforcent de le faire le mieux possible, car c’est un
travail très difficile. Je n’ai aucun désir de révolutionner la société. Mais
ma tâche est celle d’un instructeur et donc de souligner quelques vérités de la
vie spirituelle pour que chacun s’exerce à les appliquer dans son existence.
Car c’est chaque jour que nous rencontrons cette question de la justice,
puisque chaque jour nous avons affaire à des êtres humains, et rien n’est plus
difficile que d’avoir avec eux des relations correctes.
Donc,
quoi qu’il arrive, vous devez trouver l’attitude intérieure qui vous permettra
d’agir correctement avec les autres. Our cela, évitez d’abord de passer votre
temps à régler mentalement vos comptes avec les gens. Souvent je dis à
certains : "Regardez votre manque de sagesse. Sans arrêt vous pensez
à telle personne pour la critiquer, dénoncer partout ses défauts. Vous ne voyez
pas combien il est dangereux de vous occuper d’elle sans arrêt, de la porter
constamment dans votre tête comme une icône ? Puisque vous la trouvez
tellement épouvantable, pourquoi rester éternellement avec elle ? Vous la
traînez partout, vous la présentez partout pour que le monde entier ait mauvais
opinion d’elle, sans savoir que par ce lien que vous entretenez sans cesse avec
elle vous faites aussi un très mauvais travail sur vous-même. Pendant que vous
vous empoisonnez en ruminant des désirs de vengeance, vos ennemis, eux, sont
tranquilles : ils mangent, ils boivent, ils dorment, ils se promènent, et
c’est vous qui achevez sur vous-même l’entreprise de destruction qu’ils ont
commencés. Dites-moi un peu si c’est intelligent" !
On
veut se débarrasser d’un ennemi, mais en réalité on fait tout pour se lier à
lui. Car lorsqu’on déteste quelqu’un, c’est exactement comme si on l’aimait. La
haine nous attache aux êtres aussi puissamment que l’amour. Si on veut être
libéré de quelqu’un, il ne faut pas le détester. Si on le déteste, on se lie à
lui par des chaînes que personne ne pourra délier. Vous pouvez comprendre
cela ? Vous vous imaginez que la haine coupe les liens. Au contraire, la
haine est une force qui vous lie à la personne que vous haïssez. Comme l’amour.
Mais le lien, évidemment, est différent : l’amour vous apportera certaines
choses et la haine vous en apportera d’autres, mais tout aussi sûrement et tout
aussi puissamment que l’amour.
On
ne peut pas vaincre les méchants par la méchanceté, les calomniateurs par la
calomnie, les jaloux par la jalousie ou les coléreux par la colère, car c’et
s’identifier à eux, se niveler avec eux, se ranger dans la même catégorie, et
en définitive c’est eux qui seront les vainqueurs. Alors cesser de promener
partout l’image de vos ennemis. Choisissez au contraire une image d’une grande
beauté et concentrez-vous sur elle. A votre insu cette image fera un travail
magique et c’est elle qui vaincra l’image nocive.
Devant
les menaces, les hostilités, la seule solution est en haut. C’est pourquoi, dès
que vous vous sentez en danger, montez dans les régions célestes, là où brille
la lumière, et vos ennemis ne pourront plus vous atteindre, car vos vibrations
seront différentes des leurs. Vous êtes à l’abri parce que vous êtes barricadé
avec la lumière, l’amour, la puissance céleste. Ce n’est pas si facile
d’atteindre ou de vaincre quelqu’un qui est véritablement lié au Ciel. Donc,
quoi qu’on dise contre vous et quoi qu’on fasse, il faut vous mettre à un autre
diapason, monter dans une autre région où vous serez défendu, en sûreté. Chaque
jour, dans votre travail spirituel, imprégnez-vous de plus en plus de la
puissance de la lumière, envoyez des rayons lumineux à toutes les créatures et
même à celles qui vous veulent du mal. Voilà la seule méthode pour se mettra à
l’abri.
On
raconte que trois yogis étaient allés méditer dans la forêt : ils
voulaient devenir parfaits. Un homme passe et, trouvant le premier sur son
chemin, lui donne un coup. Le yogi se lève et lui en rend deux. Comme vous
voyez, la perfection était encore loin, et l’histoire ne dit pas s’il reprit sa
méditation… Continuant sa route, l’homme rencontre le deuxième yogi et lui
donne aussi un coup. Celui-là se dresse pour le rendre, mais il se reprend et
se rassied. Lui au moins avait déjà appris la maîtrise. Quant au troisième
yogi, lorsqu’il reçut le coup, il ne s’en aperçut même pas et continua à
méditer tranquillement.
La leçon est facile à
tirer : le premier yogi
appartenait encore à la catégorie
d’humains la plus répandue : ils ripostent en invoquant la justice, mais à
leur insu ils se laissent entraîner à l’injustice. Le deuxième est de ceux qui
ont appris à se maîtriser parce qu’ils ont réfléchi aux conséquences de leurs
actes ; ils se disent : "Ce n’est pas la peine, je vais encore
embrouiller des choses". Quant au troisième, il est déjà tellement évolué
qu’il ne se net même pas l’injure. Oui, mais jusque-là, quel chemin à
parcourir !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire