Avoir
des amis est considéré comme un des plus grands bonheurs de l’existence, et
c’est vrai, rien n’est plus précieux que de vrais amis. Seulement, voilà, le
plus souvent ce n’est pas de vrais amis que l’on cherche, mais des alliés, afin
d’être approuvé et soutenu quoi qu’on fasse. Connaissez-vous beaucoup de gens
qui acceptent que leurs amis soient tout à fait sincères envers eux et ne les
approuvent pas dans tous leurs actes et leurs paroles ? A la moindre
critique, ils se sentent trahis et se fâchent. Si l’on veut gagner les faveurs
de quelqu’un, il faut l’approuver, le complimenter, le flatter. C’est pourquoi,
les uns refusant d’entendre la vérité, et les autres ayant compris qu’ils n’ont
aucun intérêt à la dire, on voit un tas de gens qui passent leur temps à
tromper et à se tromper.
Celui
qui veut véritablement évoluer ne trompe pas les autres pour les
amadouer ; et surtout, il accepte les observations et les critiques. Et
même s’il est vraiment sage, il comprendra qu’il est utile d’avoir des ennemis.
Pourquoi ? Pour pouvoir progresser. Vous direz : "Mais des
ennemis, on en a, parfois on en a même beaucoup" Oui, on en a, mais on
n’en tire aucun profit, car on n’a pas encore compris que ce sont eux les
véritables amis. Pourquoi ? Parce qu’ils sont impitoyables, ils ne vous
épargneront rien, ils souligneront tout ce qui ne va pas. Vous direz :
"Mais souvent ils exagèrent". Oui, c’est vrai, mais ça ne fait rien,
ils vous servent de microscope, et c’est très utile parfois, les microscopes ;
les scientifiques s’en servent tous les jours. Cela permet de voir des détails
qui, sans cela, passeraient inaperçus. Donc, si vous voulez vraiment votre
avancement, vous devez accepter l’idée que, pour cela, vos ennemis sont souvent
plus tuiles que vos amis. C’est eux qui vous obligent à travailler, à vous
corriger, à trouver des solutions aux problèmes qu’ils vous posent et ainsi,
grâce eux, vous devenez plus fort, plus intelligent.
Il
faut bien comprendre le rôle des ennemis. Si on ne le comprend pas, on les
déteste, on souffre, on tâche de se venger, de se débarrasser d’eux et alors,
que de temps et d’énergies perdus. Et pourtant, même parmi les gens les plus
intelligents, on constate que très peu savent accepter leurs ennemis pour
devenir plus forts, la plupart pataugent dans la faiblesse ; ils ne se
rendent pas compte qu’avec le soutien de leurs amis, ils deviennent de plus en
plus fragile set vulnérables. Eh bien, moi je vous dirai que si j’ai appris
quelque chose d’important dans ma vie, c’est à apprécier les ennemis. Oui, je
trouve qu’ils m’ont rendu des services formidables. Ah, les ennemis, c’est
quelque chose ! Malheureusement, on ne les estime jamais à leur juste
valeur.
On
élève des statues à ceux que l’on considère comme des bienfaiteurs ; parce
qu’ils ont sauvé la patrie, fait des
découvertes dans les domaines scientifique, médical, qu’ils ont été de grands
poètes, de grands philosophes, etc… on les place sur un piédestal. Et on a
raison, bien ^sur. Pourtant, je trouve que c’est à nos ennemis que nous devrions
dresser les plus belles statues, car ce sont eux nos véritables
bienfaiteurs ; ils nous obligent à progresser. Vous trouvez que ce n’est
pas sérieux ? Eh bien, trouvez ce que vous voulez, mais tout de même,
tâchez de réfléchir un peu à ce que je vous dis : ne pas fuir ses ennemis,
ne pas les détester non plus, mais se demander comment on peut les utiliser
pour devenir plus vigilant, plus intelligent, plus patient et plus fort.
Pourquoi
Jésus a-t-il dit : "Si quelqu’un te frappe sur une joue, présente-lui aussi
l’autre " ? Depuis des siècles, beaucoup ont interprété
ces paroles comme un encouragement à la résignation, à la passivité, donc à la
faiblesse, et ils en ont conclu que le christianisme était une religion pour
les femmes et les esclaves ; d’autres y ont trouvé une exhortation au
martyre. Eh bien, dans les deux cas, ce sont des interprétations erronées.
Les
paroles de Jésus ne signifient pas qu’on doive toujours rester passif sous les
insultes et les mauvais traitements, toujours accepter, se soumettre, supporter
jusqu’à finir par disparaître.. Etre passif, soumis, se laisser massacrer, bien
sûr, quand on n’a pas la lumière, c’est tout ce qui reste à faire. Mais il
n’est nulle part écrit que les sages, les Initiés, les fils de Dieu doivent dépendre
du bon vouloir des imbéciles, des malhonnêtes et des méchants. Cette morale des
gens ignorants et faibles n’est pas la vraie morale du Christ. La morale du
Christ est celle de la force, mais la force de l’esprit. C’est pourquoi Jésus
disait aussi : "Vous êtes le sel de la terre t si le sel perd sa saveur,
il n’est bon qu’à être foulé aux pieds". Cela signifie que si
vous perdez "le sel", la force de l’esprit, vous serez piétiné par
les événements et les humains jusqu’à ce que vous la retrouviez à nouveau. Il
n’a pas été décrété qu’on doive toujours être piétiné, mais quand on perd sa
puissance spirituelle, fatalement on est à la merci de n’importe qui et de
n’importe quoi.
Quand
Moïse a enseigné la loi de justice : "Œil pour œil, dent pour
dent", c’était déjà un progrès, car même imparfaite, la justice représente
toujours un progrès sur l’injustice, et combien encore ne sont pas capables
d’en respecter les règles les plus élémentaires. Puis Jésus est venu pour
insister sur des qualités et des vertus qu’on avait jusque-là négligées :
l’indulgence, la clémence, la miséricorde… et c’est sur ces vertus qu’il faut
maintenant se concentrer. La nouvelle morale qu’apportait Jésus devait
encourager les humains à développer les qualités du cœur. Mais développer les
qualités de cœur ne signifie pas nécessairement négliger celles de
l’intelligence. Et être intelligent ne signifie pas rejeter l’amour. Au
contraire, il faut que l’amour et l’intelligence s’associent pour trouver les
meilleures solutions, en abandonnant, en laissant un peu de côté les idées
traditionnelles de justice.
Vous
direz : "Oui, mais il faut quand même faire appliquer la justice –
Bon, admettons, quelqu’un vous a fait du mal, mais est-ce que vous pouvez
savoir exactement d’après la Justice qu’elle punition il mérite ? – Bien
sûr, il m’a donné une gifle et je vais la lui rendre. – D’accord, mais est-ce
que vous saurez lui rendre exactement la même ? Non". Et pour toutes
les autres formes de préjudices, offenses et agressions, vous ne saurez pas rendre
exactement le mal que vous avez reçu, et aucun tribunal non plus. Alors, ne
vous mêlez pas de rendre le mal, laissez cette affaire au Ciel qui sait donner
à chacun ce qu’il mérite ; sinon, dans votre ignorance, vous allez
commettre des erreurs que vous devrez réparer un jour. Cela signifie que vous
rencontrerez à nouveau cotre ennemi sur votre chemin et que vous aurez bien
encore des problèmes avec lui.
Rien
n’est plus difficile que de rendre la justice. Dans "Le Marchande de
Venise", Shakespeare développe cette idée d’une façon très originale.
L’usurier Shylock a prêté au marchand Antonio la somme de trois mille ducats en
précisant sur le contrat que si, à la date fixée, i ne peut lui rendre cette
somme, lui, Shylock, sera autorisé à prélever sur le corps d’Antonio une livre
de chair. Le jour venu, Antonio, dont les vaisseaux ont fait naufrage avec tous
ses biens, ne peut rendre la somme à Shylock qui le traîne devant le tribunal
en réclamant la livre de chair qui lui est due. Aucune prière ne peut apitoyer
Shylock et le tribunal va être obligé de faire exécuter la sentence. Mais voilà
qu’un juge (qui est en réalité une jeune femme déguisée) intervient : il
réclame une balance, demande à Antonio de découvrir sa poitrine, et à Shylock
de retirer la livre de chair ; mais, précise-t-il, sans verser une goutte
sang puisque le contrat ne mentionne que la chair : s’il fait couler une
seule goutte de sang, sa fortune sera confisquée. Bien sûr, Shylock a peur et
veut retirer sa plainte. Mais le juge insiste, en ajoutant encore :
"Si tu diminues ou augmentes ne serait-ce que de la valeur d’un cheveu le
poids de chair convenu, tu mourras". Shylock a évidemment encore plus
peur… Et finalement tout s’arrange grâce à la sagesse de cette jeune femme qui
avait compris combien la justice humaine est imparfaite.
Lorsque
vous subissez une injustice, vous devez riposter, mais avec une telle lumière,
un tel amour que votre ennemi sera foudroyé… c'est-à-dire transformé ! Pas
anéanti, pas massacré, non : régénéré ! Au lieu de l’assommer ou de
l’éliminer, vous le vivifiez, c’est à dire vous l’amenez, lui aussi, vers
l’amour et la lumière. C’est ainsi que vous devenez un véritable héros, un
véritable fils de Dieu.
Quel
que soit le mal que vous fassent les humains, il ne faut pas penser à la
vengeance, mais il ne faut pas non plus accepter la situation de vaincu, il
faut apprendre à se défendre en devenant comme le soleil : projeter une
telle lumière qu’ils soient éblouis, aveuglés. Oui, les aveugler et ensuite
leurs ouvrir les yeux comme jésus l’a
fait avec Saül sur le chemin de Damas quand il allait massacrer les
chrétiens : une projection de lumière qui lui a fait perdre la vue, mais
pour lui donner une vision meilleure. L’enseignement du Christ est
l’enseignement de l’amour, mais pas cet amour stupide qui vous maintient dans
la faiblesse, à la merci des gens violents et cruels. Le véritable amour est
fort parce qu’il est soutenu par la Lumière.
Jésus
n’a pas dit qu’il faudra toujours se laisser massacrer. Non, il faut apprendre
à être plus fort que son ennemi. Si par un geste, par un regard, par une
vibration divine, vous lui faites sentir la supériorité de l’esprit, est-ce que ce n’est pas
mieux ? Bien sûr, c’est beaucoup mieux, mais les humains n’ont encore
jamais eu l’ambition de le souhaiter. Et moi, c’est justement cette ambition
que je veux leur donner. Quand parviendront-ils à la réaliser ? C’est une
autre question. Mais au moins, qu’ils aient ce désir, car ils ne feront rien de
vraiment bénéfique dans le monde en étant toujours passifs, conciliants.
La
non-violence n’est véritablement une solution qu’à condition que l’humanité
tout entière soit résolue à embrasser cette philosophie, sinon il y aura
toujours quelques voisins ambitieux et cruels pour se dépêcher d’anéantir les
pauvres malheureux qui ont décidé de ne pas se défendre. La non-violence est
une philosophie qui est bonne pour celui qui veut dompter sa nature inférieure,
se sacrifier et évoluer ainsi plus rapidement ; mais au niveau d’un pays
tout entier elle est dangereuse, et en tout cas elle ne peut pas résoudre le
problème de la guerre dans le monde. Un peuple attaqué par les armes et qui
décide de ne pas se défendre par les armes sera rapidement anéanti,
économiquement et physiquement. Pour être vraiment efficace, il faut que la
philosophie de la non-violence devienne collective, mondiale, universelle,
qu’elle se répande dans l’humanité tout entière, qu’elle ne reste pas seulement
dans la tête de certains idéalistes.
L’homme
possède en lui-même une forteresse avec des canons, avec des mitrailleuses qui
crachent le feu : c’est le domaine de la lumière. Donc, quand des ennemis
vous attaquent, qui vous empêchent de braquer tous ces engins sur eux et de
projeter la lumière ? Vous ne les tuez pas, vous ne leur faites pas de
mal, vous les transformez en chassant les éléments nocifs de leur tête et de
leur cœur. On vous a enseigné pendant des siècles à ne pas répondre aux
offenses. Oui, ne pas répondre de la même façon, mais il faut répondre…
répondre autrement. C’est cela "tendre l’autre joue".
Omraam.
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