On rencontre dans la vie des
personnes très douées, on est vraiment en admiration devant ce qu’elles sont
capables de réaliser et on est poussé à
les encourager. Mais, dans la plupart des cas, on constate qu’elles
croient n’avoir rien de mieux ni de plus important à faire que de cultiver
leurs talents, et c’est là leur limite. Avoir du talent, c’est très bien, mais
cela ne suffit pas, et c’est ce que je peux encore vous montrer en étudiant le
tableau des six corps :
Selon la manière dont ils se manifestent
dans l’existence, on peut, schématiquement, classer les humains en six
catégories ; la brute, encore proche de l’animal ; l’homme
ordinaire ; l’homme de talent ; le génie ; le saint ; et
enfin le grand Maître, l’Initié qui a déjà accès au règne angélique. L’homme de
génie est bien au-dessus de l’homme de talent. Mais le saint est supérieur au
génie, car il possède des qualités de pureté, de désintéressent, d’amour, de
sacrifice de soi, que ne possèdent souvent pas les génies, car uniquement
préoccupés de créer une œuvre immortelle, ils ont tendance à sacrifier leur
entourage à cette création. Et un Maître, qu’est-ce qui fait sa supériorité sur
le saint ? C’est qu’il manifeste les mêmes qualités morales et spirituelles, mais il possède en outre le
savoir et les pouvoirs.
Développer ses talents est
indispensable, mais ce n’est pas encore l’activité la plus haute, car le talent
appartient au domaine de la nature inférieure ; et on peut même dire que,
pour la majorité des humains, leurs talents ne sont que l’occasion de nourrir
leur nature inférieure. Ils croient qu’ils n’ont rien de mieux à faire que de
cultiver ces talents afin de s’imposer aux autres, de se montrer partout pour
être appréciés, applaudis, aimés, à l’exclusion de toute autre considération.
Donc, même s’il est normal de cultiver ses dons et d’apprécier aussi les dons
que les autres possèdent, il ne faut jamais perdre de vue qu’ils sont encore
l’expression de la nature inférieure égoïste, avide, vindicative. Or, que voit-on
le plus souvent ? Un homme ou une femme se distingue dans le domaine
intellectuel, artistique, sportif… tous l’apprécient, l’invitent, l’embrassent,
ils ne s’occupent pas tellement d e savoir s’il est bon, juste, honnête,
généreux. Le talent, c’est tout ce que l’on regarde et que l’on essaie aussi de
cultiver chez les enfants et les adolescents. Rien ne paraît plus important de
nos jours que de voir les jeunes réussir dans leurs études, et la joie pour les
parents d’avoir des enfants qui deviennent ingénieurs, médecins, chimistes,
juristes, économistes ;.. Le monde entier est ainsi rempli de gens
capables, talentueux, c’est formidable comme les talents pullulent ; mais
pourquoi tellement de capacités et de talents ne peuvent-ils pas sauver le
monde ?
Au contraire même, on dirait qu’ils
contribuent à le détruire… mais cela ne fait rien, quelqu’un a des connaissances
qu’il sait exposer brillamment dans des discours ou des écrits, et c’est cela
qui compte aux yeux des gens ; qu’intérieurement règnent le désordre, la
laideur, la pourriture, ça n’a aucune importance ; et c’est pourquoi
chacun ne se préoccupe que de développer des facultés qui seront appréciées par
les autres.
Penser qu’il n’existe rien de mieux que
de cultiver des dons est une grave erreur. Les dons doivent être mis à la
deuxième place. La question importante, c’est comment vivent les êtres ;
est-ce que leurs pensées, leurs sentiments et leurs actes soient en accord avec
les lois divines, avec la pureté, la noblesse, la grandeur ? On entend
souvent dire ; « ah ! Elle est tellement douée, il a tellement
de capacités, on peut tout lui pardonner ». Eh bien, voilà un très mauvais
raisonnement. Un être qui est particulièrement favorisé par la nature doit au
contraire s’efforcer de soutenir, de couronner ses dons et ses talents par des
qualités morales, spirituelles. Sinon, au lieu de devenir, comme il le devrait,
un bienfaiteur de l’humanité, il se conduit comme un criminel.
Chacun doit s’efforcer de franchir cette
frontière qui sépare sa nature inférieure de sa nature supérieure afin de
développer ses corps spirituels ; les corps causal, bouddhique et atmique.
Car contrairement à ce que beaucoup de gens ont tendance à croire, la
spiritualité n’est pas un domaine facultatif que l’on peut choisir ou ne pas
choisir comme on le fait justement pour les autres disciplines ; les
sciences, l’art, la littérature etc… Etant donné la structure de l’être humain,
la spiritualité est pour lui une nécessité vitale, et tant qu’il ne prendra pas
conscience de cette nécessité, il choisira des orientations qui finiront par se
révéler dangereuses pour lui-même et pour les autres. Tel qu’il est construit,
s’il ne cherche pas la nourriture que réclament son âme et son esprit, malgré
ses succès il sera continuellement tourmenté par un sentiment de vide qu’il
essaiera en vain de combler
Psychiquement, l’être humain est comme
un puits sans fond ; aucune réalité matérielle, aucun succès, aucun savoir
intellectuel ne peut vraiment le satisfaire. Il ne faut donc pas s’étonner si
tant de personnalités remarquables par leurs capacités, leur intelligence,
finissent par tomber dans le spires égarements ; parce qu’ils n’arrivent
pas à trouver ce qu’ils cherchent et ne sont même pas conscients de chercher,
tous ces gens sont pris dans un engrenage sans fin ; il leur faut toujours
plus de notoriété, toujours plus de pouvoir, toujours plus de places à occuper…
et ils sont prêts pour cela à asservir ou à écraser le monde entier ; mais
même quand ils ont réussi à s’emparer de tout ce qui fait l’objet de leurs
convoitises, ils ne sont pas encore satisfaits, car ils n’ont pas réussi à
combler ce bide qu’ils sentent en eux comme un gouffre géant ; ils mènent
une vie trépidante, mais au fond d’eux-mêmes c’est la mort qui gagne du
terrain.
Le seul moyen de lutter contre ce vide,
c’est d’avoir un idéal spirituel qui nous lie à un monde supérieur dont nous
recevons la nourriture et la vie. Celui qui goûte, ne serait-ce que quelques
secondes, à cet élixir de la vie divine reçoit infiniment plus que ne
pourraient lui apporter des années d’études, de succès, de pouvoir, de gloire.
Cela vous étonne ? Et bien, c’est que vous ne connaissez pas la nature du
monde spirituel. Le monde spirituel est placé sous le signe de la qualité, à la
différence du monde matériel qui est placé sous le signe de la quantité. C’est
la qualité de ce que vous vivez dans votre âme et dans votre esprit qui peut,
en une seconde, vous donner une plénitude qu’aucune découverte, aucune
réalisation intellectuelle ou artistique ne pourra jamais vous faire éprouver.
Il n’y adonc pas à être tellement
admiratif de tous ces gens talentueux, brillants, qui négligent la vie de l’âme
et de l’esprit ; et il ne faut surtout pas se fier à eux. Comme ils ne
cherchent pas une nourriture spirituelle, la seule qui pourrait les combler,
ils sont comme des fauves affamés, et leurs ambitions, leur voracité finissent
fatalement par les entraîner sur des chemins dangereux pour eux-mêmes et pour
leur entourage. Il est donc nécessaire de revoir la manière dont on envisage
l’éducation de la jeunesse. Bien sûr, on doit la pousser à développer ses talents,
mais en même temps lui faire comprendre que les talents ne représentent qu’une
étape sur ce long chemin intérieur que tous les humains ont à parcourir. Il
faut toujours aller plus loin, plus haut, ne pas se contenter de réussir dans
quelque discipline que ce soit, sinon on reste dans les grilles de la nature
inférieure, et alors là toutes les erreurs, tous les crimes même sont
possibles. Vous ne me croyez pas ? Eh bien, réfléchissez. Par qui ont été
commis les plus grandes abominations de l’histoire de l’humanité ? Par des
gens incultes, ignorants, stupides ? Non. Par des gens instruits, capables
et plein de talents, soutenus par d’autres qui étaient également instruits,
capables et pleins de talents. Il n’y adonc pas de quoi s’émerveiller devant le
talent et les capacités de ceux qui ne mettent pas ces talents et ces capacités
au service d’un idéal moral, spirituel…
Oui, il n’y a pas de quoi s’émerveiller,
mais il y a de quoi avoir peur.
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